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COLÈRE : COMMENT NE PAS LA GARDER EN MOI ET L’EXPRIMER DE MANIÈRE CONSTRUCTIVE ?

par | Sep 18, 2021

Par Sylvain

de chelous.fr

La colère. Le sujet le plus douloureux pour moi.

Car après 20 ans, le citoyen ne peut plus exiger de la bienveillance de la part de la société, notamment le temps d’apprendre. Et dieu sait que les Asperger mettent du temps à apprendre. Du temps à comprendre. Les fonctionnements à respecter en groupe. Aussi, les réserves à conserver quand on se met à discuter : pour ne pas percuter une personne, dans ses failles, ses peurs, toutes ses rigidités.

L’enjeu, en permanence : rester accepté. Ne jamais commettre le geste, prononcer la parole, qui fera, d’un coup, que l’autre, en face, vous regardera comme si vous étiez finalement trop décalé. Bizarre. Particulier. Et que ça ne sera jamais possible finalement de vivre des moments spontanés et naturels avec vous.

La peur du rejet… De perdre ce lien avec l’autre est constante chez moi. Alors, avant de me lancer, de m’exprimer, en premier lieu, toujours, un peu en retrait, j’observe. Je scrute. J’écoute. J’analyse. Je me crée ainsi une cartographie des gens autour, avec leurs comportements, leurs tempéraments. Aussi le type de liens, un à un, qui les unit. Enrichi de toutes ces données, désormais, je comprends quel comportement sera accepté ou non. Ou potentiellement jugé déplacé. Des repères cruciaux, qui me permettent de me relâcher. D’être beaucoup plus détendu, spontané, car j’ai enfin identifié l’espace de jeu dans lequel je vais pouvoir évoluer. Les contours à l’intérieur desquels, si je les respecte, je vais pouvoir rire, discuter, échanger : et ce, sans jamais me mettre en danger.

Le jeu, le partage : des notions clés, primordiales pour moi. Ainsi, quand l’analyse des situations, me conduit à la conclusion que les règles, ici, autorisent en fait la fausseté. Ou de rejeter. Ou de rabaisser. Dans ces moments-là, même si les règles sont claires, je m’y sens tant enfermé, en insécurité, balloté, que la confusion partout se répand en moi. Une alarme s’allume. Une angoisse. Une urgence : un réflexe de survie me dit d’interpeler, de crier, de signaler immédiatement que cet élément est manquant – le respect, la légèreté, ou l’amour – pour que la communauté puisse immédiatement en avoir connaissance, le reconnaître, et enfin le corriger.

Petit, ainsi, j’invectivais la société, toujours, et sans prendre de gant. C’était à cette époque toléré, car la vérité peut sortir de la bouche des enfants. Mais adulte, critiquer, dénoncer, est perçu comme une forme de violence. Un manque de respect envers les individus : qui font déjà de leur mieux. Et un manque de loyauté envers l’entreprise : qui t’a embauché, et qui te permet généreusement, chaque mois, de payer ton loyer. Ainsi, de 22 ans à 30 ans, je me taisais. J’enfouissais, chaque jour, mes interrogations, mes indignations, mes colères, dans mon corps.

Heureusement, à 30 ans, un ami m’a parlé d’une méthode : la CNV. Communication NonViolente. Qui m’offrait soudainement la possibilité de m’exprimer – mes colères, mes frustrations, mes tristesses – et ce, sans reprocher. Sans attaquer. Sans blâmer. Juste en racontant objectivement la situation qui venait de se passer. L’émotion que cela m’avait provoquée en moi, car tel besoin ultra important dans mon cas, alors, n’était pas satisfait.

Déverser sa colère, en défendant des valeurs, à la place de dénoncer immédiatement ce que je pensais être le manque de cœur des autres… La CNV m’a énormément aidé, et grandement soulagé.

Aujourd’hui, je l’utilise, toujours, surtout en pensées, pour comprendre dans les moments de difficulté, quel besoin chez moi à envie de s’exprimer. D’être écouté. Est-ce l’envie de vivre plus dans le jeu ? Un besoin de clarté concernant une relation, une consigne ? Est-ce l’envie de prendre plus de temps pour soi, pour créer, dessiner, jardiner, ou fabriquer ?

Identifier le besoin du moment à écouter, m’offre beaucoup plus de visibilité sur ce qui compte, actuellement, pour moi. Pour avancer, satisfaire ce besoin, me développer : j’essaye de compter surtout sur moi-même : pour ne pas faire dépendre ma joie et mon bonheur, d’éventuelles actions extérieures, qui parfois n’arrivent jamais.

Seulement… Pour partager, ou me sentir en sécurité, je ne peux me passer du bon vouloir des autres. De leur générosité, de leur ouverture de cœur. Ainsi, pour essayer de maximiser les probabilités que ces moments de grâce arrivent : j’encourage chacun à créer, à s’écouter, à vivre avec beaucoup plus de légèreté. Tout faire pour que chacun se reconnecte à soi. A sa fierté : au sentiment de sécurité qu’offre la pleine conscience de son humanité, son potentiel de créativité, sa tendresse, et ses forces.

Ce plaisir d’être soi offre la sécurité, pour pouvoir s’intéresser à la magie des autres. Pour ne plus, par peur, vouloir dominer, humilier, ou rejeter. Juste être ensemble, désormais, et partager nos complémentarités.

Juste être ensemble
désormais
Et partager
Nos complémentarités.

Nos complémentarités.